:Une famille niortaise reconnue parmi les Justes

Le 14 octobre, au cours d'une cérémonie officielle à l'Hôtel de Ville, Lucile Godrie reçoit à titre posthume la médaille des Justes parmi les nations.

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Dimanche 14 octobre 2012, au cours d'une cérémonie officielle organisée à l'Hôtel de Ville, Lucile Godrie, représentée par sa fille Luce Psaltis Godrie, a reçu à titre posthume la médaille des Justes parmi les nations.

Cette plus haute distinction civile de l'Etat d'Israël est décernée depuis 1963 par comité Yad Vashem chargé de rechercher en France des Justes ou leur famille qui ont sauvé des familles juives pendant la guerre.

Lucile Godrie a hébergé et caché, au péril de sa vie, la famille Bodenheimer, un couple et leurs deux enfants, de février 1943 à septembre 1944 à son domicile, au 110 rue de Grange, dans le quartier de Sainte-Pezenne.
Les récentes recherches de Frédéric Psaltis-Godrie, petit-fils de Lucile et fils de Luce, pour retrouver des descendants de la famille Bodenheimer, ont permis de révéler au grand jour le courage et l'engagement de sa propre famille, alors niortaise.

Aujourd'hui, Lucile Godrie rejoint la liste des quinze Justes honorés en Deux-Sèvres qui figure sur le mémorial Yad Vashem à Jérusalem et à Paris.

Plus d'infos sur l'histoire de la famille Bodenheimer

La famille Bodenheimer était établie à Kehl (Allemagne) depuis de nombreuses générations. Sadi, devenu chef de famille au décès de son père en 1913, a combattu dans l’armée allemande en 1914-1918. Il a épousé une strasbourgeoise.
Dans les années 1920, Sadi devient exportateur de briquets vers la France et au cours d’une tournée, il est séduit par la région du Poitou. Dès 1934, les parents et leurs trois enfants s’établissent à Strasbourg, et en 1939, réfugié allemand, le père est interné à Mirecourt (Vosges), puis transféré à Nantes en mai 1940.

Ensuite, à nouveau réunie, la famille trouve refuge à Niort chez un délégué local de l’Action Française. Là un officier allemand- compte tenu du fait que Sadi est ancien combattant- lui conseille de partir se cacher à Paris, où la famille va résider chichement jusqu’en juillet 1942. Renée-Laure, secrétaire, est seule à pouvoir travailler pour nourrir sa famille.

Prévenue par son patron de l’imminence d’une rafle, la famille échappe à celle-ci et part se réfugier à nouveau à Niort. Tout d’abord hébergée chez leur première logeuse, Mme Simonnet, la famille Bodenheimer est enfin accueillie en février 1943 par Lucile Godrie dans une partie de sa maison. Très pauvre, la famille Bodenheimer ne paie qu’une pension symbolique, procurée par le travail de Renée-Laure, employée chez un marchand de vins. Elle se procure aussi de la boisson qui sert à « payer » la paix relative laissée par les gendarmes.

Robert va au Collège Saint-Joseph, où le sous-directeur l’accepte bien que le sachant juif ; sur l’intervention de Lucile Godrie, il est dispensé d’assister aux messes. Le témoignage de la fille de Lucile Godrie fournit des détails complets sur la vie de la famille Bodenheimer chez leur bienfaitrice. Après la Libération de Niort en septembre 1944, Sadi et sa fille repartent à Paris pour chercher travail et logement, tandis qu’Elvire et Robert restent chez les Godrie jusqu’à la fin de l’année 1945. Des liens affectueux ont perduré de longues années entre les deux familles.
Alfred, le fils ainé, a milité à Lyon dans la Résistance entre 1942 et la Libération. Le frère de Sadi, Heinrich a été déporté.

(Le 15 octobre 2012)